de Bruno
Au fur et à mesure que moi-même et ceux que je côtoie vieillissent, j'entends et je lis de plus en plus "les jeunes ne savent plus écrire".
Et de plus en plus je me dis qu'il y a une véritable anomalie qu'il va bien falloir corriger tôt ou tard : pourquoi le code orthographique du français n'a-t-il pas changé depuis le XVIIIe siècle ? (cf. réforme de 1740, la seule de grande ampleur jusqu'à aujourd'hui).
La République a créé le système métrique pour rationaliser les mesures, les adapter au temps, alors pourquoi ne ferait-on pas une rationalisation de l'orthographe ??
Que quelqu'un m'explique pourquoi artichaut prend un T final, pourquoi on continue à écrire oignon alors qu'au XIXe siècle on trouvait la graphie sans I, pourquoi on met un H à haricot (on n'en mettait pas au XVIIe). Que des érudits lettrés de la Renaissance aient trouvé qu'il était plus "beau" d'écrire femme plutôt que fame (forme médiévale) pour faire plus "latin", c'est entendu, mais qu'on continue sans rien changer c'est idiot.
Les Allemands ont essayé de changer leur orthographe (en 1996, obligatoire depuis 2005), et c'est un peu beaucoup le bordel depuis. N'empêche, le double S a définitivement remplacé le ß et puis personne n'en est mort. Et le reste finira par se tasser, toujours sans aucun dommage corporel ou psychiatrique.
Ce ne sont pas les jeunes qui orthographient mal, c'est l'orthographe qui est morte-vivante. Et l'orthographe étant devenue si inadaptée, on en arrive au langage "texto"... A résister avec des institutions aussi conservatrices que l'Académie Française et l'Education Nationale, on va finir par faire tout exploser. Je ne parle même pas de la compétitivité du français par rapports aux autres plus logiques (l'espagnol par exemple).
Combien de graphie possibles pour le son "è" ?> Plus d'une dizaine (è, ê, ai, aî, aie, aix, ei, ey, ais, ait, ay, aient, ect, ep, et).
Combien de graphies possibles pour le son "s" ?> Au moins huit (s, ss, t, c, ç, x, sc, th).
Combien de prononciations différentes pour une lettre A accompagnée?> On trouve de tout ("a, è, en, ha, aë, in, ou, aille"...).
Combien de mots imprononçables sans entraînement ?> faisan, chrysanthème, chaos, appendice, zinc, eczéma, jeûne, gageure, seconde, etc.
Quelle logique entre les prononciations de mille et aiguille ? Entre abbaye, cobaye et balayer ?
Je le sais bien, ces irrégularités ont (presque) toutes une explication historique, et alors ? Je ne parle pas de syntaxe, je ne parle pas de grammaire, je ne parle que d'orthographe lexicale, l'orthographe qu'on dit "d'usage".
Comment appelait-on le droit du nord de la France avant le Code Civil ? Le "droit coutumier". Ouais, autant dire le droit d'usage, non ?..
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